Tous en Jeux ! 2e semaine sur le terrain pour Xavier

Depuis le jeudi 29 le site Paris Sud Arena est ouvert au public. Ce n'est pas la foule des Jeux Olympiques ni des salons de la Porte de Versailles. Mais c'est quand même différent et plus agréable que les jours d’avant l'ouverture. Il faut trouver des nouveaux repères pour se déplacer car des zones sont fermées au public, notamment dans les aires de transport réservées aux athlètes. Notre équipe de volontaires intervient en Transport sur 11 lieux différents, parfois distants de 20 mn à pied. En fonction des besoins on peut très bien parcourir 6 km pendant les 8 heures d’une journée !

Depuis l’ouverture au public plus personne ne se déplace en trottinette ou en gyropode Toyota. Le principal sport des volontaires c’est vraiment la marche !

Les TRANSPORTS à ARENA SUD

TX ( = Transport Taxis)

Les TX sont un service gratuit pour les accrédités qui souhaitent se rendre sur d'autres sites paralympiques, au village olympique ou dans des hôtels listés.

En arrivant devant le bureau transport le premier jour des JP je vois de nombreux taxis. Les chauffeurs sont un peu perdus. Ils demandent de l'aide à nos chefs mais ils ne sont pas leurs référents. A un moment ils disent que ce n'est plus leur rôle... Quelques jours plus tard un coordinateur (chauffeur lui-même) est présent et ils appellent un référent en cas de souci ou pour connaître leur prochaine destination.

Deux points TX sont installés près des salons de la Famille olympique : un au hall 1, à l’intérieur du site ; un autre au hall 6 à l’extérieur.

On fait le trottoir comme disent quelques volontaires ... et souvent on ne fait rien. "Le plaisir est dans l'attente" dit notre collègue sexagénaire à un taxi qui prend mal cette supposée proposition ! Ca nous a fait rire après coup …

Si aucun TX n’est présent on demande des véhicules à notre coordinateur transport qui doit les réserver. Le lundi 2, ils tardent à arriver, les clients doivent attendre plus de 20 mn. A mon retour de pause dîner, dès que je vois un TX dans la rue je vais le voir et je le convaincs de rester. Une flotte se constitue ainsi avec trois vans dont un grand pour 8 personnes et un pour PMR, deux berlines. Gary et moi réussissons à les optimiser au fur et à mesure des demandes, y compris un groupe de 7. Tout le monde trouve de la place rapidement ! Des Portugais veulent se rendre au match de cécifoot pour voir la dernière demi-heure au stade Tour Eiffel ...

Un groupe de Japonais en costume traditionnel essaie de feinter en se faisant passer pour la famille olympique mais la sécurité voit très vite qu'ils n'ont pas d'accréditation. En retard pour le match, ils partent en courant vers l'entrée des spectateurs. A cet endroit on doit aussi renseigner des personnes perdues qui cherchent le parc à vélos ou l'accès au hall 6 pour le tennis de table. Même si on le voit à quelques dizaines de mètres elles doivent marcher jusqu'à l'entrée principale de Paris Expo à 5 mn à pied.

Le mardi 3, en discutant avec Christine, conductrice de voitures et volontaire, je m'aperçois que nombre de chauffeurs bénévoles habitent dans d’autres régions. Elle c'est la Bretagne, pour d'autres rencontrés plusieurs soirs c'est la Savoie ou la Sarthe. En formation on leur a expliqué pourquoi : les concepteurs de l'application GPS qu'ils utilisent voulaient qu'ils suivent rigoureusement le chemin indiqué. Il passe parfois par des sens interdits, autorisés pendant les Jeux. Des habitués de Paris n'auraient apparemment pas toujours utilisé ce GPS en étant plus sûrs d'eux... Je me dis qu'il faut quand même être aventurier ou inconscient pour conduire un van dans Paris avec un groupe sans connaître la capitale et parfois sans parler anglais. Paris 2024 leur aurait dit que ce serait cette mission ou rien !

Ce soir-là notre équipe a suffisamment de berlines et vans à Arena 1 mais seules 3 personnes ont eu recours à nos services. 8 véhicules sont repartis vides vers 22h30. Cela dépend des soirs de matchs.

TX au Hall 1 vers 22h30

TA (= Transport Athlètes)

Les athlètes se déplacent du Village olympique vers les sites de compétition en bus collectif. Ils sont contrôlés avant de quitter leur hébergement et le bus arrive scellé, aucun arrêt n’a lieu avant Arena Sud.

Le jeudi 29 je suis le chef d'équipe pendant 6 heures au hall SP4 (hall de compétition du para tennis de table). Nous ne sommes pas remplacés toutes les 2 heures car il manque des volontaires ce jour-là. Je suis en trinôme avec Magda et un nouveau volontaire : Alain, de Palaiseau, qui se forme avec nous. Depuis une semaine je rencontre beaucoup d'Essonniens. On se dit qu'on a été affectés ici car c'est le site le plus proche avec celui de Bercy.

Je coordonne les opérations par push to talk avec SP5 (hall d’entraînement) et TC. A la fin de la journée j'ai encore le son du talkie dans les oreilles et j'en rêverai la nuit !

A cette date la procédure de montée dans les bus n'est toujours pas clarifiée. On nous a dit de faire monter les fauteuils roulants par l'avant mais les conducteurs préfèrent par l'arrière comme pour la descente. La pratique montre que c'est plus rapide et plus facile. Les passagers PMR préfèrent également. Nos chefs continuent à défendre la procédure mais laissent faire sans rien changer pour ne pas bloquer les bus.

Pour ne pas ralentir les opérations de dépose et reprise de passagers nous utilisons une rampe pliable manuelle, présente sur chaque plateforme d’arrivée. Le recours aux rampes automatisées des bus serait trop long.

Flora Vautier (Para tennis de table) part du Hall 4

TC (= Transport Connect)

Les accrédités qui n’ont pas la mention TX ou TA sur leur carte sont contraints de circuler en métro (payant) ou en TC. C’est un service spécial et gratuit pour les différents acteurs des Jeux (sauf les athlètes).

Notre rôle aux arrêts de bus se borne à noter les arrivées, départs et nombre de passagers pour des statistiques destinées à Los Angeles 2028. Mais c'est un peu mystérieux car l'organisation des transports en Californie doit être tellement différente dans une ville qu'on traverse en 2 heures du nord au sud ! Heureusement on renseigne des spectateurs égarés dans la rue qui cherchent l'entrée des halls 4 ou 6… située à 5 mn à pied. Beaucoup de bus arrivent et partent sans passagers tous les quarts d'heure. Les chauffeurs sont déçus de tourner à vide la plupart du temps. On se dit que ce service n'est sans doute pas assez connu et les arrêts pas très visibles. La preuve quand même de son efficacité : une collègue m'apprend qu'elle est revenue du Stade de France en TC jusqu'à la Porte Maillot et qu'elle en a pris un autre direct jusqu'à Arena Sud. Le tout en 45 mn. C'est plus rapide qu'en Rer + métro.

LES ATHLETES

Les premiers jours des Jeux c’est parfois difficile et long pour le placement des athlètes à bord des bus. Après la compétition ils sont fatigués ou aigris quand ils ont perdu un match. Il vaut mieux savoir les résultats avant de les rencontrer et les laisser dans leur bulle ... Ils sont pressés de monter tous en même temps. Une fois vers 21.45 on me demande de faire entrer en priorité une des plus jeunes athlètes de l'équipe britannique âgée de 14 ans car elle a une compétition très tôt le lendemain.

Entre collègues on comprend vite qu'il faut d'abord monter les fauteuils. Entre PMR ils se disputent parfois les places. Aucun ne veut être installé dans le sens inverse de la marche alors que deux places sont prévues dans cette position ...

Les fauteuils sont de tout type : petit, grand, électrique, pliable format valise, lourd, tricycle. Il y a des tendances par pays. C'est la continuité du corps et on demande toujours la permission avant de toucher le fauteuil, même pour le pousser et encore plus pour le bouger dans le bus.

Je suis souvent épaté par la dextérité des athlètes à manier leurs fauteuils à l'intérieur du bus très étroit pour 6 places PMR. Beaucoup se débrouille seul avec un minimum d'aide. Je leur décerne souvent la médaille d'or ce qui les fait sourire. A force on ne voit plus le handicap mais seulement la personne, parfois l’athlète, devant nous.

Désormais, quand je suis dans la rue, je scrute les bus et s'il a de la place pour les fauteuils roulants !

La gaffe du premier jour : un pongiste en fauteuil roulant me dit qu'il veut aller au pavillon d'entraînement. Je lui demande s'il veut y aller à pied ou en bus ! En anglais cela passe plus discrètement, il ne relève pas mon erreur …

Le 30 août matin au Stade de France

LES AUTRES SITES

STADE DE FRANCE                               

Le vendredi 30 août j’utilise le billet offert par Paris 2024 à tous les volontaires. C’est le premier jour des compétitions d'athlétisme au Stade de France. Ici aussi ce sont les bénévoles qui m'aident gentiment à trouver ma place et me donnent des conseils. Les agents de sécurité ne savent pas car ce sont leurs débuts sur le site. Je suis même renseigné par une volontaire qui est là comme moi pour assister aux compétitions mais elle est en uniforme. Comme elle prend son poste juste après dans un autre site elle ne pourra pas se changer (absence de vestiaires ou de consignes).

Il pleut sur la piste violette du Stade pour le 5000m Femmes T54. On crie pour les premières coureuses du dernier tour et ensuite pour la dernière sur la piste. C'est une clameur aussi forte que pendant les JO compte tenu que le stade est au quart plein. L'enthousiasme ne vient pas de nos rangs les plus hauts dans le stade.

Le saut en longueur Femmes T11 a lieu en même temps. Le plus grand silence est demandé à chaque passage de l'athlète car elle se repère au son de la voix de l'assistant. Ce n'est pas évident. Elles s'arrêtent souvent en plein élan. Je me demande comment elles font pour mettre le pied dans la zone blanche d'impulsion (marquée à la chaux) sans la voir. Le calme total ne se fait que pour la Française Delya Boulaghlem. Je comprends alors que le saut se produit quand l'assistant cesse de crier et de frapper des mains.

Au javelot je retrouve les voitures Toyota pour transporter les lances. Un record du monde est battu à 63.81 m au javelot Hommes F38 par le Colombien Lemos Rivas. Le "ça plane pour moi" de Plastic Bertrand retentit ! Je ne l’ai jamais entendu dans un stade avant. Nous avons droit à la cérémonie des vainqueurs du 5000m Hommes T11. On leur remet une phryge en plus de leur médaille.

Enfin la Finale 100m Femmes T35 se déroule avec le Kazakhstan, l'Irak, l'Inde, la Pologne, la Chine, l'Allemagne, les Pays-Bas. La gagnante est Xia Zhou (Chine) en 13.58 secondes. Argent pour la Chine et bronze pour l'Inde. C’était une belle matinée !

Le lundi 2 je retourne au Stade avec un billet acheté (15€). Cette fois je suis en tribune basse au 17e rang, c’est plus intéressant et mieux pour l'ambiance. Beaucoup d'écoliers de toute la France sont présents en tribunes hautes de milieu de stade. Les rangs les plus hauts sont totalement vides. C’est motivant de commencer l'année scolaire par du sport au Stade de France ! Pour faire participer les enfants les speakers leur font commencer une ola. Elle fera trois fois le tour.

Le départ de la finale 1500m Femmes T11 (avec un guide pour chaque coureuse) est ultra rapide. Le record du monde est battu par l’Ethiopienne Tesfaw en 4:31.77.

La cloche utilisée pour annoncer le dernier tour de stade sera installée à Notre Dame de Paris après les Jeux.

Au même moment, à l’Arena Paris Sud, Aurélie Aubert devient la 1ère championne paralympique française de Boccia.

Aurélie Aubert et sa coach Claudine Lliop

LA TERRASSE DES JEUX DE L’HOTEL DE VILLE

Le mardi 3, avant de prendre mon service, je vais voir Zeus dans la cour de l'hôtel de ville de Paris. Il fallait réserver un créneau horaire. Nous sommes nombreux mais l’entrée est rapide. Ensuite on reste le temps qu’on veut. Le cheval métallique et sa cavalière ont émerveillé le milliard de spectateurs lors de la cérémonie d’ouverture des Jeux Olympiques. C’est un mélange de design, de technologie et d’art. Constitué principalement d’aluminium, la tête, les sabots et le buste sont recouverts de feuilles d’argent. La cavalcade de Zeus sur la Seine reste un moment inoubliable !

LA NOURRITURE

Il faut s'enregistrer sur son espace volontaire en début de mission à l’arrivée sur le site de travail. Cela permet aussi de s'assurer un repas. Cela incite à ne pas oublier !

La nourriture est bonne : vegan un jour sur deux, à la demande de Paris 2024, ce qui ne plaît pas à tous les volontaires bien sûr. Beaucoup de légumes dans les plats. Préparés chaque jour par le traiteur Horeto, partenaire habituel de Paris Expo. Les ingrédients sont frais et goûteux ! C'est équilibré. Je n’ai été déçu qu’une fois par la salade niçoise qui n’en avait que le nom : pas de thon, des œufs et des légumes (pas de haricots) et trop de pommes de terre…

Jamais de gâteaux. Si on en veut c'est au centre des Volontaires quand on a la chance d'arriver à l'heure du ravitaillement. Mais il reste toujours des fruits (pommes et bananes).

Nous pouvons manger dans deux cantines sur le site SPA : tout d’abord celle du hall 1 dans un restaurant au premier étage, installé à demeure pour les salons. Et aussi la cantine du hall 4 qui a ouvert le 29 août. C'est plus rustique car elle est installée dans un coin du hall mais la nourriture est identique et on gagne 25 mn de marche sur notre pause quand on travaille de ce côté de SPA. De la cantine on entend très bien les réactions du public en tribune et on suit donc en direct les résultats du tennis de table...

Un soir nous voyons arriver un petit groupe en poncho. On leur demande s'il pleut. "Non, disent-ils, dessous nous sommes en costume de cérémonie des vainqueurs et on se protège pour ne pas avoir de taches..."

ET LA SUITE ...

Il reste 4 jours jusqu'à la cérémonie de clôture mais le site ferme ses portes samedi soir.

Je reste motivé pour la suite des Jeux. Avec les athlètes et les amis volontaires. Avec les mêmes ingrédients que cette semaine écoulée : solidarité, patience, partage, adaptation, compréhension.